Le Ministre des Colonies,
Vu le décret organique du 20 janvier 1921 sur le service postal et
spécialement l'article 2 ;
Arrête :
Article premier.
Il
est émis des timbres-poste de guerre du Congo Belge avec surtaxe, dont
le nombre, les valeurs et les couleurs sont déterminés ci-après :
50 000 timbres-poste à dix francs : vert
50 000 timbres-poste à dix francs : bleu
Art. 2.
Il est émis des timbres-poste de guerre du Ruanda-Urundi avec
surtaxe,dont le nombre, les valeurs et les couleurs sont déterminés
ci-après :
25 000 timbres-poste à dix francs : rouge
25 000 timbres-poste à dix francs : azur
Art. 3.
Les timbres visés aux articles 1 et 2 comportent une surtaxe de 40
francs dont le produit sera versé respectivement aux articles 15C et 9A
du Budget pour ordre du Congo Belge et du Ruanda-Urundi (Timbres "Fonds
Colonial des Œuvres de Guerre 1941") pour être mis à la disposition de
M. P. Ryckmans, Gouverneur Général de la Colonie en sa
qualité de représentant du Fonds Colonial des Œuvres de Guerre.
Art. 4.
Le tirage est limité aux quantités prévues aux articles 1 et 2.
Art. 5.
Ces
timbres-poste serviront pour l'affranchissement des correspondances
tant en service intérieur qu'en service international à leur valeur
nominale respective de dix francs.
Art. 6.
Un exemplaire de chacun de ces timbres est annexé en épreuve au présent
arrêté.
Londres, le 30 octobre 1941.
A. De Vleeschauwer
L'origine de l'émission "Spitfire" par Luc Vander Marcken (Les Congolâtres n°2 - février 2013 - p. 19)
Tous
les collectionneurs du Congo Belge ou du Ruanda-Urundi connaissent ces
quatre petits timbres (2 au Congo, 2 au Ruanda-Urundi) référencés dans
le C.O.B. sous les n° 268 - 269 pour le Congo Belge et 148 - 149 pour le
Ruanda-Urundi et surnommés dans le catalogue« Spitfire».
Pourquoi
cette appellation? Combien de collectionneurs pourraient l'expliquer de
nos jours? Le catalogue de Belgique étant absolument muet au sujet de
ce surnom, c'est dans les livres d'histoire coloniale que l'on peut
trouver l'explication.
Suite à l'invasion allemande de la Belgique
en mai 1940, le Congo se trouve isolé du gouvernement et des ministres
en fuite devant le déferlement des armées allemandes. Le gouverneur
Général, Pierre Ryckmans, dès l'annonce de l'invasion donne l'ordre de
mobiliser la Force Publique afin de défendre la colonie contre toutes
agressions terrestres par le nord-est de la colonie (les italiens
d'Abyssinie étant à une distance de 500 km) ou maritimes, les U-boot
allemands pouvant bloquer l'estuaire du fleuve Congo et ainsi étouffer
la principale voie d'acheminement de toutes les marchandises entrantes
ou sortantes du Congo. Il est clair pour l'équipe gouvernante de la
Colonie que le Congo se battra du côté des Alliés afin d'aider à la
délivrance de la Métropole. De jeunes colons désireux de se battre aux
côtés des alliés essaieront de gagner l'Angleterre.
D'autres,
suite à un accord passé avec le gouvernement de l'Afrique du sud
partiront suivre une formation de pilote de chasse à l'école de
pilotage de Littleton dans ce pays.
Ces jeunes pilotes belges
après leur formation rejoindront soit la Royal Air Force (R.A.F.) en
Grande-Bretagne, soit la South African Air Force (SAAF) d'Afrique du
sud. Les Britanniques sont d'accord d'incorporer ces jeunes recrues
dans leurs escadrilles. Mais, expliquent-ils au Gouvernement Belge en
exil et aux autorités congolaises, ils n'ont pas les moyens financiers
pour équiper ces pilotes avec des appareils de chasse. S'ils veulent se
battre pour aider les alliés il faut que leur gouvernement paie leurs
avions !
Suite à cet état de chose on décide au Congo de lancer une souscription pour payer des Spitfires à nos pilotes. Dans le
Courrier d'Afrique du
1
er juin 1941 on se réjouit du lancement de cette souscription et on
annonce dans un encadré que 40.000 Frs ont été déjà offerts par le
personnel du journal. Peu après les établissements Madail versent
20.000 Fr. Le 29 juin, l'ouverture officielle de la souscription
Avions de combat est annoncée
sous le haut patronage de Monsieur le Gouverneur Général. Un
comité chargé de cette souscription réussit à convaincre les autorités
postales de la colonie d'émettre quatre timbres à surtaxe dans ce but,
d'où leur surnom de« Spitfire ».
Epreuve avec indication de correction, numéro de commande et perforation d'annulation;
Il
est à remarquer que la surtaxe est très importante (40 F) et on
pourrait croire que les coloniaux seraient rebutés par une surtaxe
aussi élevée. Au contraire, l'émission de ces timbres est un franc
succès et plusieurs personnes n'hésitent pas à en acheter par feuilles
entières.
L'engouement des européens vivant au Congo pour cette
souscription est important et on organise toutes sortes d'évènements
pouvant contribuer à la récolte des fonds. On décide que les avions
seront baptisés du nom de localités du Congo ou du nom de pionniers de
la colonie. Moins d'un an plus tard le Gouverneur remettra à Hope Gill,
consul général de Grande-Bretagne, un chèque de 250 millions de francs
congolais ou 44 millions de livres représentant la valeur de 50
Spitfires. Désormais nos jeunes pilotes pourront combattre et
s'illustrer sur les différents théâtres d'opérations.