Issu de l'École Royale Militaire, nommé sous-lieutenant d'artillerie le
13 décembre 1880, Costermans entre au service de l'État Indépendant du
Congo en qualité de lieutenant de la Force publique. Embarqué à
Flessingue le 3 octobre 1890, il débarque à Boma le 2 novembre. Après
un court séjour à N'zobe, il est désigné pour prendre le commandement
du district du Stanley-Pool, où il arrive le 26 mai 1891. Un décret du
Roi-Souverain en date du 26 septembre 1891 le nomme Commissaire de
district de 2e classe ; malheureusement, son état de santé le rappelle
à la côte; le 24 février 1892, il remet son commandement à l'ingénieur
Rolin et descend à Boma, où il arrive le 10 mars, pour embarquer vers
l'Europe le 16 avril. Au cours de ce premier
séjour à Léopoldville, Costermans donne la mesure de ses moyens en
déployant une remarquable activité appliquée à la réalisation d'un
programme de construction d'habitations et de camps et au
ravitaillement d'une population qui ne cessait de s'accroître. Le
lieutenant Masui, de passage à Léopoldville en mai 1892, rapporte que
résidants et passagers constituaient une population de quarante-trois
Européens. Le 6 décembre 1892, Costermans repart pour l'Afrique.
Il est désigné à nouveau pour prendre le commandement du district du
Stanley-Pool, mais en avril 1894, sa santé, à nouveau ébranlée, lui
commande de résigner ses fonctions et de reprendre le chemin de
l'Europe (20 mai 1894). Costermans est un grand
nerveux qui ne peut s'abstraire des préoccupations de sa charge; une
partie de ses nuits s'écoule à arpenter la véranda de son habitation ;
de là lui vient le surnom de "gondoko" (le léopard), que lui donnèrent
les indigènes. Cette extrême nervosité l'a ramené deux fois en Europe
avant la date assignée ; elle ne sera pas étrangère à la fin tragique
de sa vie. Le 8 septembre 1895, Costermans
quitte Anvers pour retourner au Congo. Arrivé le 30, il est pour la
troisième fois désigné pour reprendre le district du Stanley-Pool. Il
atteint Léopoldville le 28 octobre. Sous son énergique direction,
ce poste, tête de ligne des voies de pénétration dans le Haut-Congo, a
pris un développement considérable. L'arrivée du rail de Matadi et le
lancement sur le fleuve des premières unités de 150 tonnes vont
intensifier un trafic d'année en année croissant. Des problèmes de
ravitaillement, d'ordre technique, d'administration indigène, etc. se
posent chaque jour plus nombreux. Costermans y fait face avec autorité.
En 1895 et 1896 on procède sous ses ordres au balisage du Stanley-Pool,
de Léopoldville à Kimpoko. Il effectue des reconnaissances dans
l'hinterland de Léopoldville, chez les Banfumu et en publie
d'intéressantes relations. Le Gouvernement reconnaît ces services en le
nommant Commissaire Général le 1er juin 1897. Il rentre en Europe le 27
juillet 1898. Nommé Inspecteur d'État le 1er
mars 1899, Costermans reprend pour la quatrième fois le chemin de
l'Afrique, investi de la haute direction des districts du Stanley-Pool
et du Kwango. Il arrive à Boma le 27 mars et rejoint Léopoldville.
Pendant deux années encore il préside au développement de la station
qui laisse deviner la ville importante qu'elle est appelée à devenir.
Le grand portage sur la route des caravanes n'est plus qu'un souvenir ;
la marine du Haut-Congo qui prolonge le rail se développe et réclame
des installations portuaires pour permettre le trafic que comportera la
réalisation des grands travaux publics projetés dans le Haut-Congo ;
problèmes complexes, auxquels Costermans et ses successeurs apportent
d'heureuses solutions. Le 16 mars 1901, Costermans rentre en Europe prendre un repos largement mérité.
C'est en qualité de Commissaire du Gouvernement que Costermans
s'embarque à Naples le 7 janvier 1902 pour l’Afrique.
Le Roi-Souverain, convaincu que la seule façon d'assurer l'intégrité de
l'État était non seulement d'en faire fixer les limites dans des actes
diplomatiques, mais d'en assurer la garde par une occupation effective
et impressionnante, mettait en œuvre tous les moyens dont il disposait.
A cette époque la frontière Tanganika - Ruzizi
était contestée par les Allemands, qui avaient profité d'un relâchement
de notre occupation, déterminé par la révolte des soldats de Dhanis,
pour s'avancer en territoire congolais jusqu'à la rivière Ruzizi.
Pour appuyer ses droits et prévenir de nouveaux empiétements, l'État
Indépendant recourut à une forte occupation de la région. Costermans
fut choisi pour l'organiser. Arrivé à Uvira le
23 avril, il procède, conformément aux ordres du Roi-Souverain, à
l'établissement d'un cordon de fortifications s'étendant de Babandana,
au Nord du lac Kivu, jusqu'à Uvira, sur le Tanganika. Uvira, Baraka,
Luvungi, Rutshuru furent dotés de puissantes redoutes construites par
le commandant du génie De Kemmeter. Armés d'artillerie, soutenus par
des garnisons importantes et bien entraînées, ces points d'appui en
imposèrent aux Allemands, qui ne tentèrent plus de progresser.
Costermans, qui avait remplacé le capitaine Milz au Kivu, après
dix-huit mois d'un labeur fécond, remet le commandement de la région au
capitaine d'État-major Tombeur et rentre en Belgique le 12 septembre
1903. L'attention qu'apportait Léopold II
à la défense des frontières de l'État Indépendant ne fut sans doute pas
sans peser une fois encore sur le choix qu'il fit de Costermans pour
exercer les fonctions de Gouverneur Général. La
frontière franco-congolaise dans la région des Cataractes et la défense
du Bas Fleuve préoccupaient le Roi-Souverain. Le 20 novembre 1903,
Costermans est nommé Vice-Gouverneur Général et désigné pour reprendre
le Gouvernement général de l'État que détenait de manière intérimaire
le président du Tribunal d'Appel Fuchs. Il repart en Afrique le 7
janvier 1904 et prend ses fonctions le 13 février suivant.
Ses regards se portent sur la défense du Bas Fleuve, qui n'est assurée
que par le Fort de Shinkakasa ; il suit avec intérêt les travaux qui
doivent mettre cet ouvrage en état de jouer son rôle et les études qui
visent à lui apporter les compléments défensifs indispensables.
En octobre 1904, la Commission d'Enquête instituée par le Roi-Souverain
pour faire là lumière sur la situation au Congo arrive à Boma.
La campagne anti-congolaise battait son plein. Les erreurs
d'administration, les fautes d'agents sont relevées et démesurément
amplifiées dans certaine presse ; des abus isolés sont cités comme
représentatifs d'un système. De pénibles
polémiques, généralement basées sur des faits inexactement rapportés
par la presse étrangère ou inspirées chez nous par des préoccupations
de politique intérieure ou commerciale, divisaient l'opinion en
Belgique. La charge de l'Administration congolaise, en butte à de
perfides attaques, était devenue singulièrement délicate. L'attitude de
certaines puissances pouvait faire croire que le destin de l'État
Indépendant était à la merci d'une erreur.
Costermans a dû s'en émouvoir. S'est-il exagéré la gravité des
conclusions que devait contenir le Rapport de la Commission
d'Enquête ? S'est-il considéré comme responsable de certains vices
d'organisation et des abus qu'ils permettaient ? Ce n'est pas
improbable, si l'on tient compte de son excessive nervosité. Les
médecins s'étaient rendu compte de cet état pathologique et, inquiets,
avaient prescrit de ne pas le laisser seul. Hélas! au cours d'un séjour
qu'il fit à Banana, il réussit à tromper la surveillance et, le 9 mars
1905, il mit fin à ses jours. Sa dépouille mortelle fut ramenée en
Belgique. Pour perpétuer la mémoire de ce
pionnier de la civilisation au Congo, le Gouvernement décida, en 1927,
que le poste de Bukavu, chef-lieu du district du Kivu, porterait le nom
de Costermansville. Costermans avait été créé
officier de l'Ordre Royal du Lion, chevalier de l'Ordre de Léopold, de
l'Étoile Africaine, de la Légion d'Honneur ; il était porteur de
l'Étoile de Service à 4 raies et de la Croix Militaire de 2è classe. 19 décembre 1946. Engels. (Biographie coloniale p. 268)